Promenade (1/4)

Publié le par Lyskald

Une fois n'est  pas coutume, je vous propose de lire une nouvelle écrite il y a quelques temps déjà. Plutôt qu'un extrait, la nouvelle étant courte, je la publie en entier en plusieurs articles. Voici donc la première partie de l'histoire. Cela se passe à Montpellier dans un cadre contemporain avec quelques accents fantastiques.  Cette nouvelle fait partie d'un recueil (inachevé pour l'heure) ainsi donc je vous demanderais de me contacter si vous souhaitez réutiliser tout ou partie de ce texte afin d'obtenir mon autorisation.


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Promenade
Première partie


Musique dans les oreilles, le pas hésitant et le regard embrumé, elle traversait la Comédie. La pluie tombait drue sur la place devenue glissante. Imperméable à l’agitation des cafés, à la rumeur du tramway qui filait, elle tourna la tête vers la rue de la Loge qui se dessinait derrière la fontaine des Trois Grâces. Elle s’y engagea, au milieu des passants pressés et ceux nonchalants, s’arrêtant pour admirer les prouesses d’un jongleur-joueur d’harmonica qui monopolisait la moitié de la rue. Elle, au contraire, ne prêta aucune attention à ce spectacle.

La musique s'arrêta, elle chercha du bout du doigt la commande de musique en boucle de son lecteur mp3. Alors qu‘elle appuyait sur le bouton de lecture, elle leva la tête et regarda fixement la rue Jacques Cœur qui plongeait dans le vieux quartier des marchands. Elle semblait absorbée. On ne sait ce qu’elle y vit, une illusion, peut-être un souvenir ou simplement un rayon de soleil qui l’aurait éblouie.

Elle reprit sa route en remontant la rue de la Loge d’où la pluie ruisselait de chaque côté. Cela ne gêna pas l’automate-ours en peluche qui continuait à faire des bulles près de la vitrine d’une boutique de mode. Ses cheveux maintenant trempés, elle passa devant les rues Saint-Guilhem et de l’Aiguillerie pour aboutir dans la rue Foch. Au loin, elle voyait déjà se profiler l’Arc de Triomphe.

Arrivée sous ce dernier monument qui ne l’abrita qu’un court instant, elle examina les bus et les voitures qui déboulaient à toute vitesse du boulevard Henri IV avant d’aller rejoindre la Promenade du Peyrou. Construite sur les hauteurs de la ville et aménagée sur plusieurs niveaux, la grande esplanade du XVIIIème, où trône fièrement Louis XIV à cheval, renferme un château d’eau à demi encerclé d’un bassin, c’est aussi un lieu de rendez-vous très prisé à Montpellier.

Mais elle, la promeneuse, paraissait n’attendre personne, elle était juste venue là pour passer un moment malgré la pluie battante. Elle alla se réfugier sous le dôme du château d’eau qui ressemblait étrangement à un petit temple. Là, elle rangea son lecteur mp3 dans son sac et sortit un livre de poche, les «  Contes Cruels » de Villiers de l’Isle-Adam.

La pénombre du jour s’était changée en nuit opaque, perforée le long de la promenade par les immenses lampadaires urbains. Les « Contes Cruels » avaient glissé de ses mains et gisaient, les pages au vent, à un mètre d’elle. Huit heures, neuf heures, minuit, le jour s’enfuit très vite dès que le solstice d’hiver a surgi et elle se demandait justement combien de temps était passé depuis qu’elle se trouvait ici. La pluie avait cessé et la promenade ne faisait aucun bruit.

Après avoir réuni toutes ses affaires dans son sac, elle se précipita dans l’escalier qui descend du château d’eau pour rejoindre l’esplanade. Ses pas claquaient sur les marches et résonnaient en canon, propagés par le bitume sur les murs et murets du Peyrou, comme si plusieurs personnes marchaient en même temps.

Cet écho tonitruant la rendait mal à l’aise, elle doutait de sa seule présence en ce lieu. Elle s’arrêta un instant et sonda la promenade, ses alentours. Elle entendit une voiture filer à toute allure dans la rue Pitot juste en contrebas. Mais après, rien, le silence.

Ravalant sa salive, elle essaya d’oublier cette idée et marcha en direction des Arceaux, derrière le Peyrou. Elle prit un autre escalier et l’écho tonitruant recommença de plus belle. Elle se surprit alors à accélérer son pas, l’écho suivit la cadence et perdit vite le rythme. La cacophonie s’installa, elle ne savait plus quel était le son premier de celui répercuté. Et si cela avait été quelqu’un d’autre, elle n’aurait pas su d’où venait les pas. Ses doutes la reprenaient, elle tentait de ne pas les écouter et de ne penser qu’à une seule chose, rentrer chez elle, vite.

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Vous pouvez lire la seconde partie en cliquant ici.

Publié dans Extraits de nouvelles

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I
Bien le bonsoir !Je viens de lire la première partie de ta nouvelle d'une traite. Montpellier est une ville où j'ai plaisir à me balader (j'habite pas loin... près de Sète), et j'ai retrouvé toute l'ambiance de cette ville. Où puis-je lire la suite ? Merci pour ce petit moment de lecture.Au plaisir de te relire,Ps : Merci de ton passage sur mon p'tit blog...
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L
J'ai habité longtemps près de Montpellier , non loin de la "petite Camargue" c'est pour cela que le dédale des rues de l'Ecusson ne m'est pas inconnu. Pour la suite, je vais bientôt publier la deuxième partie, dans la journée, je pense.Mreci de ta visite Izzabel :)
N
Ben oui, c'est un feuilleton alors?C'est très bien écrit ...et on visite en même temps !  cha^peau  à bientôt...
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L
Merci beaucoup Nymphea, oui une petite visite un peu spéciale de Montpellier.